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#la_joie_de_vivre
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#la_joie_de_vivre

VIP-Blog de arcen_ciel
  • 339 articles publiés
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  • Créé le : 02/03/2005 08:39
    Modifié : 08/01/2006 19:45

    Garçon (49 ans)
    Origine : AISNE
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    Poéme du salon #lajoie_de_vivre

    09/03/2005 19:28



    La pensée

    Un soir, vaincu par le labeur
    Où s'obstine le front de l'homme,
    Je m'assoupis, et dans mon somme
    M'apparut un bouton de fleur.

    C'était cette fleur qu'on appelle
    Pensée ; elle voulait s'ouvrir,
    Et moi je m'en sentais mourir :
    Toute ma vie allait en elle.

    Echange invisible et muet :
    A mesure que ses pétales
    Forçaient les ténèbres natales,
    Ma force à moi diminuait.

    Et ses grands yeux de velours sombre
    Se dépliaient si lentement
    Qu'il me semblait que mon tourment
    Mesurât des siècles sans nombre.

    "Vite, ô fleur, l'espoir anxieux
    De te voir éclore m'épuise ;
    Que ton regard s'achève et luise
    Fixe et profond dans tes beaux yeux !"

    Mais, à l'heure où de sa paupière
    Se déroulait le dernier pli,
    Moi, je tombais enseveli
    Dans la nuit d'un sommeil de pierre.





    Poéme du salon #lajoie_de_vivre

    09/03/2005 19:32



    Souvenir

    J'espérais bien pleurer, mais je croyais souffrir
    En osant te revoir, place à jamais sacrée,
    O la plus chère tombe et la plus ignorée
    Où dorme un souvenir !

    Que redoutiez-vous donc de cette solitude,
    Et pourquoi, mes amis, me preniez-vous la main,
    Alors qu'une si douce et si vieille habitude
    Me montrait ce chemin ?

    Les voilà, ces coteaux, ces bruyères fleuries,
    Et ces pas argentins sur le sable muet,
    Ces sentiers amoureux, remplis de causeries,
    Où son bras m'enlaçait.

    Les voilà, ces sapins à la sombre verdure,
    Cette gorge profonde aux nonchalants détours,
    Ces sauvages amis, dont l'antique murmure
    A bercé mes beaux jours.

    Les voilà, ces buissons où toute ma jeunesse,
    Comme un essaim d'oiseaux, chante au bruit de mes pas.
    Lieux charmants, beau désert où passa ma maîtresse,
    Ne m'attendiez-vous pas ?

    Ah ! laissez-les couler, elles me sont bien chères,
    Ces larmes que soulève un coeur encor blessé !
    Ne les essuyez pas, laissez sur mes paupières
    Ce voile du passé !

    Je ne viens point jeter un regret inutile
    Dans l'écho de ces bois témoins de mon bonheur.
    Fière est cette forêt dans sa beauté tranquille,
    Et fier aussi mon coeur.

    Que celui-là se livre à des plaintes amères,
    Qui s'agenouille et prie au tombeau d'un ami.
    Tout respire en ces lieux ; les fleurs des cimetières
    Ne poussent point ici.

    Voyez ! la lune monte à travers ces ombrages.
    Ton regard tremble encor, belle reine des nuits ;
    Mais du sombre horizon déjà tu te dégages,
    Et tu t'épanouis.

    Ainsi de cette terre, humide encor de pluie,
    Sortent, sous tes rayons, tous les parfums du jour :
    Aussi calme, aussi pur, de mon âme attendrie
    Sort mon ancien amour.

    Que sont-ils devenus, les chagrins de ma vie ?
    Tout ce qui m'a fait vieux est bien loin maintenant ;
    Et rien qu'en regardant cette vallée amie
    Je redeviens enfant.

    O puissance du temps ! ô légères années !
    Vous emportez nos pleurs, nos cris et nos regrets ;
    Mais la pitié vous prend, et sur nos fleurs fanées
    Vous ne marchez jamais.

    Tout mon coeur te bénit, bonté consolatrice !
    Je n'aurais jamais cru que l'on pût tant souffrir
    D'une telle blessure, et que sa cicatrice
    Fût si douce à sentir.

    Loin de moi les vains mots, les frivoles pensées,
    Des vulgaires douleurs linceul accoutumé,
    Que viennent étaler sur leurs amours passées
    Ceux qui n'ont point aimé !

    Dante, pourquoi dis-tu qu'il n'est pire misère
    Qu'un souvenir heureux dans les jours de douleur ?
    Quel chagrin t'a dicté cette parole amère,
    Cette offense au malheur ?

    En est-il donc moins vrai que la lumière existe,
    Et faut-il l'oublier du moment qu'il fait nuit ?
    Est-ce bien toi, grande âme immortellement triste,
    Est-ce toi qui l'as dit ?

    Non, par ce pur flambeau dont la splendeur m'éclaire,
    Ce blasphème vanté ne vient pas de ton coeur.
    Un souvenir heureux est peut-être sur terre
    Plus vrai que le bonheur.

    Eh quoi ! l'infortuné qui trouve une étincelle
    Dans la cendre brûlante où dorment ses ennuis,
    Qui saisit cette flamme et qui fixe sur elle
    Ses regards éblouis ;

    Dans ce passé perdu quand son âme se noie,
    Sur ce miroir brisé lorsqu'il rêve en pleurant,
    Tu lui dis qu'il se trompe, et que sa faible joie
    N'est qu'un affreux tourment !

    Et c'est à ta Françoise, à ton ange de gloire,
    Que tu pouvais donner ces mots à prononcer,
    Elle qui s'interrompt, pour conter son histoire,
    D'un éternel baiser !

    Qu'est-ce donc, juste Dieu, que la pensée humaine,
    Et qui pourra jamais aimer la vérité,
    S'il n'est joie ou douleur si juste et si certaine
    Dont quelqu'un n'ait douté ?

    Comment vivez-vous donc, étranges créatures ?
    Vous riez, vous chantez, vous marchez à grands pas ;
    Le ciel et sa beauté, le monde et ses souillures
    Ne vous dérangent pas ;

    Mais, lorsque par hasard le destin vous ramène
    Vers quelque monument d'un amour oublié,
    Ce caillou vous arrête, et cela vous fait peine
    Qu'il vous heurte le pied.

    Et vous criez alors que la vie est un songe ;
    Vous vous tordez les bras comme en vous réveillant,
    Et vous trouvez fâcheux qu'un si joyeux mensonge
    Ne dure qu'un instant.

    Malheureux ! cet instant où votre âme engourdie
    A secoué les fers qu'elle traîne ici-bas,
    Ce fugitif instant fut toute votre vie ;
    Ne le regrettez pas !

    Regrettez la torpeur qui vous cloue à la terre,
    Vos agitations dans la fange et le sang,
    Vos nuits sans espérance et vos jours sans lumière :
    C'est là qu'est le néant !

    Mais que vous revient-il de vos froides doctrines ?
    Que demandent au ciel ces regrets inconstants
    Que vous allez semant sur vos propres ruines,
    A chaque pas du Temps ?

    Oui, sans doute, tout meurt ; ce monde est un grand rêve,
    Et le peu de bonheur qui nous vient en chemin,
    Nous n'avons pas plus tôt ce roseau dans la main,
    Que le vent nous l'enlève.

    Oui, les premiers baisers, oui, les premiers serments
    Que deux êtres mortels échangèrent sur terre,
    Ce fut au pied d'un arbre effeuillé par les vents,
    Sur un roc en poussière.

    Ils prirent à témoin de leur joie éphémère
    Un ciel toujours voilé qui change à tout moment,
    Et des astres sans nom que leur propre lumière
    Dévore incessamment.

    Tout mourait autour d'eux, l'oiseau dans le feuillage,
    La fleur entre leurs mains, l'insecte sous leurs pieds,
    La source desséchée où vacillait l'image
    De leurs traits oubliés ;

    Et sur tous ces débris joignant leurs mains d'argile,
    Etourdis des éclairs d'un instant de plaisir,
    Ils croyaient échapper à cet être immobile

    Qui regarde mourir !
    Insensés ! dit le sage. Heureux dit le poète.
    Et quels tristes amours as-tu donc dans le coeur,
    Si le bruit du torrent te trouble et t'inquiète,
    Si le vent te fait peur?

    J'ai vu sous le soleil tomber bien d'autres choses
    Que les feuilles des bois et l'écume des eaux,
    Bien d'autres s'en aller que le parfum des roses
    Et le chant des oiseaux.

    Mes yeux ont contemplé des objets plus funèbres
    Que Juliette morte au fond de son tombeau,
    Plus affreux que le toast à l'ange des ténèbres
    Porté par Roméo.

    J'ai vu ma seule amie, à jamais la plus chère,
    Devenue elle-même un sépulcre blanchi,
    Une tombe vivante où flottait la poussière
    De notre mort chéri,

    De notre pauvre amour, que, dans la nuit profonde,
    Nous avions sur nos coeurs si doucement bercé !
    C'était plus qu'une vie, hélas ! c'était un monde
    Qui s'était effacé !

    Oui, jeune et belle encor, plus belle, osait-on dire,
    Je l'ai vue, et ses yeux brillaient comme autrefois.
    Ses lèvres s'entr'ouvraient, et c'était un sourire,
    Et c'était une voix ;

    Mais non plus cette voix, non plus ce doux langage,
    Ces regards adorés dans les miens confondus ;
    Mon coeur, encor plein d'elle, errait sur son visage,
    Et ne la trouvait plus.

    Et pourtant j'aurais pu marcher alors vers elle,
    Entourer de mes bras ce sein vide et glacé,
    Et j'aurais pu crier : " Qu'as-tu fait, infidèle,
    Qu'as-tu fait du passé? "

    Mais non : il me semblait qu'une femme inconnue
    Avait pris par hasard cette voix et ces yeux ;
    Et je laissai passer cette froide statue
    En regardant les cieux.

    Eh bien ! ce fut sans doute une horrible misère
    Que ce riant adieu d'un être inanimé.
    Eh bien ! qu'importe encore ? O nature! ô ma mère !
    En ai-je moins aimé?

    La foudre maintenant peut tomber sur ma tête :
    Jamais ce souvenir ne peut m'être arraché !
    Comme le matelot brisé par la tempête,
    Je m'y tiens attaché.

    Je ne veux rien savoir, ni si les champs fleurissent;
    Ni ce qu'il adviendra du simulacre humain,
    Ni si ces vastes cieux éclaireront demain
    Ce qu'ils ensevelissent.

    Je me dis seulement : " Ŕ cette heure, en ce lieu,
    Un jour, je fus aimé, j'aimais, elle était belle. "
    J'enfouis ce trésor dans mon âme immortelle,
    Et je l'emporte à Dieu !





    Poéme du salon #lajoie_de_vivre ,

    09/03/2005 19:34



    Sur trois marches de marbre rose

    Depuis qu'Adam, ce cruel homme,
    A perdu son fameux jardin,
    Où sa femme, autour d'une pomme,
    Gambadait sans vertugadin,
    Je ne crois pas que sur la terre
    Il soit un lieu d'arbres planté
    Plus célébré, plus visité,
    Mieux fait, plus joli, mieux hanté,
    Mieux exercé dans l'art de plaire,
    Plus examiné, plus vanté,
    Plus décrit, plus lu, plus chanté,
    Que l'ennuyeux parc de Versailles.
    Ô dieux ! ô bergers ! ô rocailles !
    Vieux Satyres, Termes grognons,
    Vieux petits ifs en rangs d'oignons,
    Ô bassins, quinconces, charmilles !
    Boulingrins pleins de majesté,
    Où les dimanches, tout l'été,
    Bâillent tant d'honnêtes familles !
    Fantômes d'empereurs romains,
    Pâles nymphes inanimées
    Qui tendez aux passants les mains,
    Par des jets d'eau tout enrhumées !
    Tourniquets d'aimables buissons,
    Bosquets tondus où les fauvettes
    Cherchent en pleurant leurs chansons,
    Où les dieux font tant de façons
    Pour vivre à sec dans leurs cuvettes !
    Ô marronniers ! n'ayez pas peur ;
    Que votre feuillage immobile,
    Me sachant versificateur,
    N'en demeure pas moins tranquille.
    Non, j'en jure par Apollon
    Et par tout le sacré vallon,
    Par vous, Naďades ébréchées,
    Sur trois cailloux si mal couchées,
    Par vous, vieux maîtres de ballets,
    Faunes dansant sur la verdure,
    Par toi-même, auguste palais,
    Qu'on n'habite plus qu'en peinture,
    Par Neptune, sa fourche au poing,
    Non, je ne vous décrirai point.
    Je sais trop ce qui vous chagrine ;
    De Phoebus je vois les effets :
    Ce sont les vers qu'on vous a faits
    Qui vous donnent si triste mine.
    Tant de sonnets, de madrigaux,
    Tant de ballades, de rondeaux,
    Où l'on célébrait vos merveilles,
    Vous ont assourdi les oreilles,
    Et l'on voit bien que vous dormez
    Pour avoir été trop rimés.

    En ces lieux où l'ennui repose,
    Par respect aussi j'ai dormi.
    Ce n'était, je crois, qu'à demi :
    Je rêvais à quelque autre chose.
    Mais vous souvient-il, mon ami,
    De ces marches de marbre rose,
    En allant à la pièce d'eau
    Du côté de l'Orangerie,
    Ŕ gauche, en sortant du château ?
    C'était par là, je le parie,
    Que venait le roi sans pareil,
    Le soir, au coucher du soleil,
    Voir dans la forêt, en silence,
    Le jour s'enfuir et se cacher
    (Si toutefois en sa présence
    Le soleil osait se coucher).
    Que ces trois marches sont jolies !
    Combien ce marbre est noble et doux !
    Maudit soit du ciel, disions-nous,
    Le pied qui les aurait salies !
    N'est-il pas vrai ? Souvenez-vous.
    - Avec quel charme est nuancée
    Cette dalle à moitié cassée !
    Voyez-vous ces veines d'azur,
    Légères, fines et polies,
    Courant, sous les roses pâlies,
    Dans la blancheur d'un marbre pur ?
    Tel, dans le sein robuste et dur
    De la Diane chasseresse,
    Devait courir un sang divin ;
    Telle, et plus froide, est une main
    Qui me menait naguère en laisse.
    N'allez pas, du reste, oublier
    Que ces marches dont j'ai mémoire
    Ne sont pas dans cet escalier
    Toujours désert et plein de gloire,
    Où ce roi, qui n'attendait pas,
    Attendit un jour, pas à pas,
    Condé, lassé par la victoire.
    Elles sont près d'un vase blanc,
    Proprement fait et fort galant.
    Est-il moderne ? est-il antique ?
    D'autres que moi savent cela ;
    Mais j'aime assez à le voir là,
    Étant sûr qu'il n'est point gothique.
    C'est un bon vase, un bon voisin ;
    Je le crois volontiers cousin
    De mes marches couleur de rose ;
    Il les abrite avec fierté.
    Ô mon Dieu ! dans si peu de chose
    Que de grâce et que de beauté !

    Dites-nous, marches gracieuses,
    Les rois, les princes, les prélats,
    Et les marquis à grands fracas,
    Et les belles ambitieuses,
    Dont vous avez compté les pas ;
    Celles-là surtout, j'imagine,
    En vous touchant ne pesaient pas.
    Lorsque le velours ou l'hermine
    Frôlaient vos contours délicats,
    Laquelle était la plus légère ?
    Est-ce la reine Montespan ?
    Est-ce Hortense avec un roman,
    Maintenon avec son bréviaire,
    Ou Fontange avec son ruban ?
    Beau marbre, as-tu vu la Vallière ?
    De Parabère ou de Sabran
    Laquelle savait mieux te plaire ?
    Entre Sabran et Parabère
    Le Régent même, après souper,
    Chavirait jusqu'à s'y tromper.
    As-tu vu le puissant Voltaire,
    Ce grand frondeur des préjugés,
    Avocat des gens mal jugés,
    Du Christ ce terrible adversaire,
    Bedeau du temple de Cythère,
    Présentant à la Pompadour
    Sa vieille eau bénite de cour ?
    As-tu vu, comme à l'ermitage,
    La rondelette Dubarry
    Courir, en buvant du laitage,
    Pieds nus, sur le gazon fleuri ?
    Marches qui savez notre histoire,
    Aux jours pompeux de votre gloire,
    Quel heureux monde en ces bosquets !
    Que de grands seigneurs, de laquais,
    Que de duchesses, de caillettes,
    De talons rouges, de paillettes,
    Que de soupirs et de caquets,
    Que de plumets et de calottes,
    De falbalas et de culottes,
    Que de poudre sous ces berceaux,
    Que de gens, sans compter les sots !
    Règne auguste de la perruque,
    Le bourgeois qui te méconnaît
    Mérite sur sa plate nuque
    D'avoir un éternel bonnet.
    Et toi, siècle à l'humeur badine,
    Siècle tout couvert d'amidon,
    Ceux qui méprisent ta farine
    Sont en horreur à Cupidon !...
    Est-ce ton avis, marbre rose ?
    Malgré moi, pourtant, je suppose
    Que le hasard qui t'a mis là
    Ne t'avait pas fait pour cela.
    Aux pays où le soleil brille,
    Près d'un temple grec ou latin,
    Les beaux pieds d'une jeune fille,
    Sentant la bruyère et le thym,
    En te frappant de leurs sandales,
    Auraient mieux réjoui tes dalles
    Qu'une pantoufle de satin.
    Est-ce d'ailleurs pour cet usage
    Que la nature avait formé
    Ton bloc jadis vierge et sauvage
    Que le génie eût animé ?
    Lorsque la pioche et la truelle
    T'ont scellé dans ce parc boueux,
    En t'y plantant malgré les dieux,
    Mansard insultait Praxitèle.
    Oui, si tes flancs devaient s'ouvrir,
    Il fallait en faire sortir
    Quelque divinité nouvelle.
    Quand sur toi leur scie a grincé,
    Les tailleurs de pierre ont blessé
    Quelque Vénus dormant encore,
    Et la pourpre qui te colore
    Te vient du sang qu'elle a versé.

    Est-il donc vrai que toute chose
    Puisse être ainsi foulée aux pieds,
    Le rocher où l'aigle se pose,
    Comme la feuille de la rose
    Qui tombe et meurt dans nos sentiers ?
    Est-ce que la commune mère,
    Une fois son oeuvre accompli,
    Au hasard livre la matière,
    Comme la pensée à l'oubli ?
    Est-ce que la tourmente amère
    Jette la perle au lapidaire
    Pour qu'il l'écrase sans façon ?
    Est-ce que l'absurde vulgaire
    Peut tout déshonorer sur terre
    Au gré d'un cuistre ou d'un maçon ?





    Poéme du salon #lajoie_de_vivre ,

    09/03/2005 19:36



    Un rêve

    Ballade


    La corde nue et maigre,
    Grelottant sous le froid
    Beffroi,
    Criait d'une voix aigre
    Qu'on oublie au couvent
    L'Avent.

    Moines autour d'un cierge,
    Le front sur le pavé
    Lavé,
    Par décence, à la Vierge
    Tenaient leurs gros péchés
    Cachés ;

    Et moi, dans mon alcôve,
    Je ne songeais à rien
    De bien ;
    La lune ronde et chauve
    M'observait avec soin
    De loin ;

    Et ma pensée agile,
    S'en allant par degré,
    Au gré
    De mon cerveau fragile,
    Autour de mon chevet
    Rêvait.

    - Ma marquise au pied leste !
    Qui ses yeux noirs verra,
    Dira
    Qu'un ange, ombre céleste,
    Des choeurs de Jéhova
    S'en va !

    Quand la harpe plaintive
    Meurt en airs languissants,
    Je sens,
    De ma marquise vive,
    Le lointain souvenir
    Venir !

    Marquise, une merveille,
    C'est de te voir valser,
    Passer,
    Courir comme une abeille
    Qui va cherchant les pleurs
    Des fleurs !

    Ô souris-moi, marquise !
    Car je vais, à te voir,
    Savoir
    Si l'amour t'a conquise,
    Au signal que me doit
    Ton doigt.

    Dieu ! si ton oeil complice
    S'était de mon côté
    Jeté !
    S'il tombait au calice
    Une goutte de miel
    Du ciel !

    Viens, faisons une histoire
    De ce triste roman
    Qui ment !
    Laisse, en tes bras d'ivoire,
    Mon âme te chérir,
    Mourir !

    Et que, l'aube venue,
    Troublant notre sommeil
    Vermeil,
    Sur ton épaule nue
    Se trouve encor demain
    Ma main !

    Et ma pensée agile,
    S'en allant par degré
    Au gré
    De mon cerveau fragile,
    Autour de mon chevet
    Rêvait !

    - Vois-tu, vois-tu, mon ange,
    Ce nain qui sur mon pied
    S'assied !
    Sa bouche (oh ! c'est étrange !)
    A chaque mot qu'il dit
    Grandit.

    Vois-tu ces scarabées
    Qui tournent en croissant,
    Froissant
    Leurs ailes recourbées
    Aux ailes d'or des longs
    Frelons ?

    - Non, rien ; non, c'est une ombre
    Qui de mon fol esprit
    Se rit,
    C'est le feuillage sombre,
    Sur le coin du mur blanc
    Tremblant.

    - Vois-tu ce moine triste,
    Là, tout près de mon lit,
    Qui lit ?
    Il dit : " Dieu vous assiste ! "
    A quelque condamné
    Damné !

    - Moi, trois fois sur la roue
    M'a, le bourreau masqué,
    Marqué,
    Et j'eus l'os de la joue
    Par un coup mal visé
    Brisé.

    - Non, non, ce sont les nonnes
    Se parlant au matin
    Latin ;
    Priez pour moi, mignonnes,
    Qui mon rêve trouvais
    Mauvais.

    - Reviens, oh ! qui t'empêche,
    Toi, que le soir, longtemps,
    J'attends !
    Oh ! ta tête se sèche,
    Ton col s'allonge, étroit
    Et froid !

    Otez-moi de ma couche
    Ce cadavre qui sent
    Le sang !
    Otez-moi cette bouche
    Et ce baiser de mort,
    Qui mord !

    - Mes amis, j'ai la fièvre,
    Et minuit, dans les noirs
    Manoirs,
    Bêlant comme une chèvre,
    Chasse les hiboux roux
    Des trous.





    Poéme du salon #lajoie_de_vivre

    09/03/2005 19:40



    La nuit d'août

    LA MUSE

    Depuis que le soleil, dans l'horizon immense,
    A franchi le Cancer sur son axe enflammé,
    Le bonheur m'a quittée, et j'attends en silence
    L'heure où m'appellera mon ami bien-aimé.
    Hélas ! depuis longtemps sa demeure est déserte ;
    Des beaux jours d'autrefois rien n'y semble vivant.
    Seule, je viens encor, de mon voile couverte,
    Poser mon front brûlant sur sa porte entr'ouverte,
    Comme une veuve en pleurs au tombeau d'un enfant.

    LE POČTE

    Salut à ma fidèle amie !
    Salut, ma gloire et mon amour !
    La meilleure et la plus chérie
    Est celle qu'on trouve au retour.
    L'opinion et l'avarice
    Viennent un temps de m'emporter.
    Salut, ma mère et ma nourrice !
    Salut, salut consolatrice !
    Ouvre tes bras, je viens chanter.

    LA MUSE

    Pourquoi, coeur altéré, coeur lassé d'espérance,
    T'enfuis-tu si souvent pour revenir si tard ?
    Que t'en vas-tu chercher, sinon quelque hasard ?
    Et que rapportes-tu, sinon quelque souffrance ?
    Que fais-tu loin de moi, quand j'attends jusqu'au jour ?
    Tu suis un pâle éclair dans une nuit profonde.
    Il ne te restera de tes plaisirs du monde
    Qu'un impuissant mépris pour notre honnête amour.
    Ton cabinet d'étude est vide quand j'arrive ;
    Tandis qu'à ce balcon, inquiète et pensive,
    Je regarde en rêvant les murs de ton jardin,
    Tu te livres dans l'ombre à ton mauvais destin.
    Quelque fière beauté te retient dans sa chaîne,
    Et tu laisses mourir cette pauvre verveine
    Dont les derniers rameaux, en des temps plus heureux,
    Devaient être arrosés des larmes de tes yeux.
    Cette triste verdure est mon vivant symbole ;
    Ami, de ton oubli nous mourrons toutes deux,
    Et son parfum léger, comme l'oiseau qui vole,
    Avec mon souvenir s'enfuira dans les cieux.

    LE POČTE

    Quand j'ai passé par la prairie,
    J'ai vu, ce soir, dans le sentier,
    Une fleur tremblante et flétrie,
    Une pâle fleur d'églantier.
    Un bourgeon vert à côté d'elle
    Se balançait sur l'arbrisseau ;
    Je vis poindre une fleur nouvelle ;
    La plus jeune était la plus belle :
    L'homme est ainsi, toujours nouveau.

    LA MUSE

    Hélas ! toujours un homme, hélas ! toujours des larmes !
    Toujours les pieds poudreux et la sueur au front !
    Toujours d'affreux combats et de sanglantes armes ;
    Le coeur a beau mentir, la blessure est au fond.
    Hélas ! par tous pays, toujours la même vie :
    Convoiter, regretter, prendre et tendre la main ;
    Toujours mêmes acteurs et même comédie,
    Et, quoi qu'ait inventé l'humaine hypocrisie,
    Rien de vrai là-dessous que le squelette humain.
    Hélas ! mon bien-aimé, vous n'êtes plus poète.
    Rien ne réveille plus votre lyre muette ;
    Vous vous noyez le coeur dans un rêve inconstant ;
    Et vous ne savez pas que l'amour de la femme
    Change et dissipe en pleurs les trésors de votre âme,
    Et que Dieu compte plus les larmes que le sang.

    LE POČTE

    Quand j'ai traversé la vallée,
    Un oiseau chantait sur son nid.
    Ses petits, sa chère couvée,
    Venaient de mourir dans la nuit.
    Cependant il chantait l'aurore ;
    Ô ma Muse, ne pleurez pas !
    Ŕ qui perd tout, Dieu reste encore,
    Dieu là-haut, l'espoir ici-bas.

    LA MUSE

    Et que trouveras-tu, le jour où la misère
    Te ramènera seul au paternel foyer ?
    Quand tes tremblantes mains essuieront la poussière
    De ce pauvre réduit que tu crois oublier,
    De quel front viendras-tu, dans ta propre demeure,
    Chercher un peu de calme et d'hospitalité ?
    Une voix sera là pour crier à toute heure :
    Qu'as-tu fait de ta vie et de ta liberté ?
    Crois-tu donc qu'on oublie autant qu'on le souhaite ?
    Crois-tu qu'en te cherchant tu te retrouveras ?
    De ton coeur ou de toi lequel est le poète ?
    C'est ton coeur, et ton coeur ne te répondra pas.
    L'amour l'aura brisé ; les passions funestes
    L'auront rendu de pierre au contact des méchants ;
    Tu n'en sentiras plus que d'effroyables restes,
    Qui remueront encor, comme ceux des serpents.
    Ô ciel ! qui t'aidera ? que ferai-je moi-même,
    Quand celui qui peut tout défendra que je t'aime,
    Et quand mes ailes d'or, frémissant malgré moi,
    M'emporteront à lui pour me sauver de toi ?
    Pauvre enfant ! nos amours n'étaient pas menacées,
    Quand dans les bois d'Auteuil, perdu dans tes pensées,
    Sous les verts marronniers et les peupliers blancs,
    Je t'agaçais le soir en détours nonchalants.
    Ah ! j'étais jeune alors et nymphe, et les dryades
    Entr'ouvraient pour me voir l'écorce des bouleaux,
    Et les pleurs qui coulaient durant nos promenades
    Tombaient, purs comme l'or, dans le cristal des eaux.
    Qu'as-tu fait, mon amant, des jours de ta jeunesse ?
    Qui m'a cueilli mon fruit sur mon arbre enchanté ?
    Hélas ! ta joue en fleur plaisait à la déesse
    Qui porte dans ses mains la force et la santé.
    De tes yeux insensés les larmes l'ont pâlie ;
    Ainsi que ta beauté, tu perdras ta vertu.
    Et moi qui t'aimerai comme une unique amie,
    Quand les dieux irrités m'ôteront ton génie,
    Si je tombe des cieux, que me répondras-tu ?

    LE POČTE

    Puisque l'oiseau des bois voltige et chante encore
    Sur la branche où ses oeufs sont brisés dans le nid ;
    Puisque la fleur des champs entr'ouverte à l'aurore,
    Voyant sur la pelouse une autre fleur éclore,
    S'incline sans murmure et tombe avec la nuit,

    Puisqu'au fond des forêts, sous les toits de verdure,
    On entend le bois mort craquer dans le sentier,
    Et puisqu'en traversant l'immortelle nature,
    L'homme n'a su trouver de science qui dure,
    Que de marcher toujours et toujours oublier ;

    Puisque, jusqu'aux rochers tout se change en poussière ;
    Puisque tout meurt ce soir pour revivre demain ;
    Puisque c'est un engrais que le meurtre et la guerre ;
    Puisque sur une tombe on voit sortir de terre
    Le brin d'herbe sacré qui nous donne le pain ;

    Ô Muse ! que m'importe ou la mort ou la vie ?
    J'aime, et je veux pâlir ; j'aime et je veux souffrir ;
    J'aime, et pour un baiser je donne mon génie ;
    J'aime, et je veux sentir sur ma joue amaigrie
    Ruisseler une source impossible à tarir.

    J'aime, et je veux chanter la joie et la paresse,
    Ma folle expérience et mes soucis d'un jour,
    Et je veux raconter et répéter sans cesse
    Qu'après avoir juré de vivre sans maîtresse,
    J'ai fait serment de vivre et de mourir d'amour.

    Dépouille devant tous l'orgueil qui te dévore,
    Coeur gonflé d'amertume et qui t'es cru fermé.
    Aime, et tu renaîtras ; fais-toi fleur pour éclore.
    Après avoir souffert, il faut souffrir encore ;
    Il faut aimer sans cesse, après avoir aimé.





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